Galerie contemporaine

Après l’hiver, avant le printemps / After Winter, Before Spring

Christine Kirouac et Doug Smith se connaissent depuis longtemps et ont tous deux fait leurs armes sur la scène artistique de Winnipeg au milieu des années 1980. Leurs carrières ont pris des chemins différents au cours des trente dernières années, mais ont naturellement convergé pour cette première collaboration d’ambitieux travaux de graphite sur papier.

Christine Kirouac et Doug Smith

du 30 mai
au 27 mai, 2019

Whyte Ridge, dans la banlieue sud de Winnipeg et où Kirouac et sa mère âgés vivent, est au croisement de la tension entre le mondain et le sauvage, contrairement au discours populaire critique sur les développements urbains.

Construit sous une route naturelle de la migration des oies, il y existe une interdépendance forcée entre les humains et les systèmes naturels qui parfois s’entrechoquent, particulièrement après que l’hiver commence à s’estomper, mais avant que le printemps n’arrive totalement. Les dessins au graphite de Kirouac de parties d’oiseaux démembrées, des arbres nus drainés de toute couleur montrent l’évidence de ces batailles entre la croissance naturelle et notre compulsion à vouloir la « corriger », la façonnant et la taillant agressivement dans une conformité inoffensive. D’après l’étude minutieuse d’un vrai romantisme, Kirouac souligne sa relation avec ces formes isolées et vulnérables et leur occupation prudente d’un environnement clairsemé, un processus d’acceptation non seulement de leurs blessures, mais des siennes aussi. Pour plusieurs, le moment le plus difficile de l’année dans les prairies du Nord est entre l’hiver et le printemps. Considéré comme une saison en soi, le passage de mars à avril montre que le spectre des gris, les vents glaciaux impitoyables et les formes graphiques noires, silhouettes et lignes dures découpant le paysage enneigé, peuvent se dérober sous la forme d’une poésie sublime.

Doug Smith
Christine Kirouac
Doug Smith
Christine Kirouac

Revenir à la maison après sept ans aux États-Unis a été une décision difficile prise par nécessité, non selon le désir, et la routine est devenue une partie essentielle à la survie de Kirouac.

Elle a marché quotidiennement dans les mêmes rues, les mêmes baies passant devant les mêmes maisons de stuc beige, les mêmes allées, arbustes et arbres, photographiant avec son téléphone cellulaire ces figures organiques qui se montraient à elle en se rebellant. À la maison, elle en a scruté chaque détail par le dessin, ajoutant du papier au fur et à mesure afin de leur permettre de se développer comme ils en avaient besoin. Un corbeau ramené à la maison après s’être fait frapper par une voiture, un conifère décapité, un Caragana arborescent, les silhouettes précises des galles gonflées de champignons nodulaires tendent tous vers d’émouvantes contradictions visuelles, pleines de théâtre, de drame, de mortalité et de beauté. 

Le dessin à grande échelle de Smith, A March Moment, reflète une perspective macroscopique pour travailler de concert avec les observations intimes de Kirouac au cœur de la communauté de banlieue. Quand Kirouac a présenté l’idée de collaboration dans un projet double examinant les limites de la banlieue de Whyte Ridge, Smith avait pour prémisse initiale d’adopter une posture critique face à l’expansion urbaine. Toutefois, au fil du temps, Smith a exploré différents types de récits, explorant la mythologie. Smith a travaillé sur les périmètres de son voisinage durant leur échange d’idées et c’est sa promenade quotidienne à vélo vers le quartier de Whyte Ridge qui a magnifié la séparation de ce développement des années 1980 du plus ancien Winnipeg où il habite. Smith devait traverser des zones résidentielles, une zone industrielle, des conclaves de magasins à grande surface, de larges artères de circulation en direction des barrières acoustiques en bois derrière lesquelles des blocs carrés nets, des toits et des murs se dressent. Là se trouve Whyte Ridge, nichée dans un amas de culs de sacs. Les maisons géométriques basses qui se dressent avec force entre ciel et terre. La ligne d’horizon limitée des arbres et la géométrie répétitive des « maisons à l’emporte-pièce » renforcent l’effet. Indicateurs de cette intersaison particulière lorsque deux climats partagent le même espace dans le temps, le chevauchement conflictuel des systèmes météorologiques conjure la sensation d’un espace mythologique et primordial.

Arrive le dessin Into The Aether.

Ce dessin à panneaux laisse entrevoir le mouvement viscéral d’un souvenir, tremplin d’un portrait personnel de la maison d’enfance de Smith, rasée sans cérémonie pour faire place à un stationnement. Le vieux détruit pour faire place au neuf, un récit poussiéreux. Dans ce dessin, la maison agit comme une forme de nœud de transmission, dansant à travers les brumes de la mémoire et signifiant d’une incarnation transmissible des expériences de vie intimes. Les deux artistes utilisent l’environnement banlieusard comme un lieu improbable pour réfléchit sur la maison, les sentiments, le souvenir, la mortalité et l’harmonie. Après l’hiver, avant le printemps est une invitation à reconsidérer ce qui se trouve sous nos yeux.

Doug Smith
Doug Smith
After Winter, Before Spring

Christine Kirouac and Doug Smith have known each other a long time and both cut their teeth on the Winnipeg art scene beginning in the mid-eighties. Their careers took different paths over the past thirty years, but have now naturally converged for the first time collaboration of ambitious graphite works on paper. The South Winnipeg suburb of Whyte Ridge, where Kirouac and her elderly mother live, sits at a point of tension between mundane and savage, contrary to the popular critical discourse around urban suburb developments. Built beneath a natural geese migratory route, a forced interdependency between humans and natural systems exist and at times clash, particularly after winter begins to relent, but before spring fully arrives. Her graphite drawings of dismembered bird parts, stripped trees drained of colour lay bare evidence of the battles between natural growth and our compulsion to “correct” it, aggressively shaping and grooming it into inoffensive conformity. Using the scrutiny of a true romantic, Kirouac draws out her relationship with and to these isolated and vulnerable forms and their cautionary occupancy of the sparse environment, a process of acceptance of not only their violent wounds, but her own as well. To many, the most difficult time of the year in the Northern prairies is in between Winter and Spring. Considered a season in and of itself, March through April presents the duality of how the spectrum of grays, relentless icy winds, and graphic black shapes, silhouettes and harsh lines cutting the snowscape can give way to a kind of sublime poetry. Coming back home, after seven years in the United States was a difficult decision made out of necessity not desire, and routine became a vital part of Kirouac’s survival. She walked daily venturing along the same streets, bays, past the same taupe stucco houses, driveways, shrubs and trees, shooting cell phone source images of these organic figures quietly rebelling that would show themselves to her. At home, she would scrutinize each detail through drawing, adding paper as she went allowing them to grow as they needed. A crow carried home after being hit by a car, a decapitated evergreen, a Weeping Caragana, crisp silhouettes of swollen galls of black knot fungi all lend themselves to visual and moving contradictions, rife with theatre, drama, mortality and beauty. Smith’s large scale drawing A March Moment reflects a macroscopic perspective to work in concert with Kirouac’s intimate observations within the suburb community. When Kirouac presented the idea of collaborating on a dual project examining the outlying suburb of Whyte Ridge, Smith’s initial premise was to pursue a critical stance on the trend of urban expansion. In time, however, Smith navigated towards a different type of narrative, exploring the mythological. Smith worked on the perimeter of this neighbourhood at the time of their idea exchange and it was his daily bicycle sojourn towards the Whyte Ridge area that magnified the separation of that eighties development from Winnipeg’s older interior where he lives. Smith would pass through residential areas, an industrial zone, conclaves of big box stores, large arterial feeder roads towards the wooden sound barriers from which clean square blocks, roofs and walls would rise behind. Therein lay Whyte Ridge, tucked away in cul-de-sacs. The low rising geometric houses of emphatically bracketed by great prairie sky. The limited treeline and repetitive geometrics of “cookie cutter houses” enhanced the effect. Indicative of that particular inter season when the two climates are sharing the same space in time, the overlapping clashing of weather systems conjured a sense of a mythological and primordial space. Enter the drawing, Into The Aether. This multi-panel drawing infers a visceral movement of a point in memory, spring boarding off a personal portraiture of Smith’s childhood house that was unceremoniously razed to make way for a parking lot. The old torn down for new construction, a dusty narrative. In this drawing, the house acts as a form of transmission node, dancing through the gauze of memory and signifier of a transmittable embodiment of intimate living experiences. Both artists use this suburb site as an improbable locus to reflect on home, sentiment, recollection, mortality and harmony. After Winter, Before Spring is an invitation to reconsider what lies in plain sight.